SEO

December 21, 2010

1+1=Les seins et la mathématique

1+1=Les seins et la mathématique

Qui se souvient encore que « mathématique » indique le processus d’apprendre et de transmettre. Qu’un mathématicien ne s’arrête jamais : on ne fige pas le savoir. On ne fige pas non plus, à l’instar de la pensée d’Héraclite le monde, avec lequel on joue. Tout savoir n’est qu’intermédiaire et pourtant, pour l’acquérir, il faut comme l’explique si bien Jean Toussaint Desanti, une mentalité de flambeur : on risque indéfiniment ses acquis, ses certitudes, son bien être physique et moral sur le prochain coup des dés.

La division des classes, si chère à Marx, pourrait ainsi, à la limite, se résumer entre ceux qui remettent encore et toujours leurs certitudes en jeu et ceux qui ne pensent qu’à les figer, une fois pour toutes, au sein d’un idéogramme explicatif de l’Holos, d’un vase clos comme naïvement l’exprimaient les premiers chrétiens : un socle solide (la terre), enfermé par un firmament aérien statique qui tourne autour.

A mettre indéfiniment en cause ses propres certitudes n’est pas signe d’éphémère : Euclide ne sera (en partie), contesté que par Einstein, près de deux mille ans après sa naissance. Entre temps, ceux qui bâtirent des empires de certitude, qu’il soit religieux, éthique ou politique avaient disparu, et les murs qu’ils avaient érigés autour de leur savoir figé - et justificateur de leurs intolérances -, s’étaient écroulés.

S’opposent ainsi deux passions : la passion de comprendre et celle de défendre. Les systèmes à vase clos, qu’ils s’appellent église, mosquée, CGT MEDEF ou UMP, voient le mode à travers le prisme prioritaire de sauvegarde de leur système respectif. Leur cohérence est absolue, vue de ce prisme particulier. Ils ont réponse à tout, et l’incohérence n’est apparente qu’à ceux qui se placent en dehors. Mais ceux là, non seulement ne comptent pas, mais en plus, ils sont à la recherche constante et perpétuelle d’une réponse à venir, ce qui, avouons-le, n’est pas de tout repos. Les uns sont « sécurisés » et « effrayés » par tout ce qui n’adhère pas à leur monde. Les autres sont outrés par les certitudes holistiques et contraignantes qui les empêchent de jouer avec l’inconnu. 

Le fameux « sentiment d’insécurité » qui pousse les « gouvernants » gardiens du temple de l’inamovible à interdire, stigmatiser, ostraciser l’altérité n’est pas autre chose que le soupçon d’une fin de leurs certitudes, la peur que la terre tourne effectivement autour du soleil, et, tout compte fait, qu’ils sont mortels en tant qu’individus et en tant que système. Jacqueline de Romilly qui s’était d’emblée posée à la périphérie de notre monde pour échapper à son message de barbarie, choisissant l’ailleurs grec, expliquait, dans « La crainte et l’angoisse dans le théâtre d’Eschyle », que l’important n’était pas le dit mais la forme et le lieu choisi pour le dire : l’invention du Théâtre comme lieu sacré au même titre que l’Agora et le Temple « collectivise » puis « apaise » les angoisses, leur enlevant leur caractère vindicatif et irrationnel. Les héros, la Moira ou les Euménides, chassent symboliquement les peurs de la Cité, au lieu de monter les citoyens les uns contre les autres. Il n’existe de futur que collectif.

Comme l’indique Richard Dawkins, ce n’est qu’un choix arbitraire parmi bien d’autres que de penser que « l’évolution est dirigée vers nous », que tout se justifie par rapport à ce que nous sommes devenus. La bactérie ou le poisson que nous avons été avaient d’autres chats à fouetter que de se sentir fiers de devenir un jour ce que nous sommes. Comme nous, ce qui les préoccupait c’était de survivre au jour le jour (défendre ce qu’il sont) et, pour certains, « comprendre », c’est à dire s’assumer et s’aventurer dans l’inconnu. Tous ceux qui érigèrent un mur de certitudes, durèrent peut-être un temps mais finirent par disparaître en se fossilisant. Tous ceux qui s’aventurèrent hors des murs, effleurant l’inconnu, prenant des risques utopiques comme Ulysse, évoluèrent. Nous sommes leurs descendants, mais ils ne sont pas nos ancêtres.

Cuve commune, matrice, la mathématique explore le passé et le futur au même titre. Celui de la fin des certitudes.

Si aujourd’hui l’intolérance ici (Europe) et ailleurs (fondamentalismes de tout poil) se font de plus en plus sentir, cela est sans doute le signe que les gardiens du temple sont pris par le vertige de cette fin des certitudes. Terrorisés, ils ne bâtissent plus des cathédrales (symbole si il en est d’un monde pérenne), mais excluent et interdisent pour les uns et font exploser pour les autres (symboles s’il en est d’un temps qui s’accélère) tout ce qui cultive leurs angoisses et met en cause leurs certitudes. 

En nous disant qu’il n’existe qu’un système économique, qu’un régime politique, qu’une vérité, qu’un seul chemin, ils prennent celui des fossiles. 

Vers 410 après J.C. la lapidation d’Hypatie, une femme philosophe, par des fanatiques chrétiens sonna le déclin définitif d’Alexandrie, la « perle de la Méditerranée » et la transformation du christianisme en « système hiérarchique et fermé » sous la protection de l’empereur Théodose.

Pour les fanatiques, il y avait un double affront à corriger : celui de la philosophie du doute et celui de la femme savante. Qu’a-t-il changé depuis ?

Ils ont brûlé la bibliothèque d’Alexandrie alors, et aujourd’hui ils font exploser les bouddhas de Bamiyan.

Par contre, la pensée grecque, celle de la Cité, a permis à une autre femme, Phryné, une simple hétaire, l’amante de Phidias, de sauver sa peau rien qu’en montrant ses seins. Ce qui est beau est vrai, disaient-ils. Eux, sont nos ancêtres. Comme n’a cessé de le dire durant toute sa vie Jacqueline de Romilly. 

http://whatgetsmehot.posterous.com/11les-seins-et-la-mathematique 1+1=Les seins et la mathématique Qui se souvient encore que « mathématique » indique le processus d’apprendre et de transmettre. Qu’un mathématicien ne s’arrête jamais : on ne fige pas le savoir. On ne fige pas non plus, à l’instar de la pensée d’Héraclite le monde, avec ... Dogmeat